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La Civilisation Thrace

Les Thraces sont l'une des plus anciennes civilisations en Europe. Le cœur de leur territoire se trouve sur la partie centrale de la péninsule des Balkans, le territoire de la Bulgarie actuelle, bien que leur présence est attestée jusqu'en Egypte et en Asie Mineure. Les études sur cette grande civilisation ont été entreprises il y a tout juste quelques décennies et beaucoup de découvertes significatives ont été réalisées après l'an 2000. Cela souligne la relativité du savoir et la remise à plat périodique de certaines thèses à la lumière de nouvelles découvertes. La branche de l'histoire qui traite leur sujet s'appelle Thracologie.

Origine des Thraces

A ce jour il n'y a pas d'écriture authentifiée des Thraces, les témoignages écrits à leur sujet sont réalisés le plus souvent en grec ancien et plus tard, lors de l'invasion romaine, en latin. Les sources décrivant les Thraces émanent d'historiens, annalistes et autres observateurs de l'Antiquité. Il existe également d'inscriptions d'origine thrace, faites en grec ancien (utilisé couramment par les Thraces).

Le nom Thraces (Traki) apparaît pour la première fois dans le second chant de l'Iliade d'Homère où il désigne ainsi la population du Chersonèse de Thrace (actuelle Péninsule de Gallipoli, Grèce). Cette désignation, en revanche, ne se recouvre avec aucune réalité archéologique ou linguistique, ne se rencontre nulle part dans les mythes antiques ni dans les écrits d'historiens antiques comme Hérodote ou Thucydide. Etant donné la période chronologique de l'Iliade (1 600 a 1 200 avant notre ère), le terme Thraces ne peut avoir qu'une signification relative qui désigne une population nombreuse occupant le territoire entre les Carpates et la mer Égée avec ses îles ainsi qu'une partie du nord-ouest de l'Asie Mineure.

Deux théories tiennent place aujourd'hui concernant qui sont les Thraces. La première veut qu'ils soient des peuples cavaliers nomades venus du nord, nord-est, en provenance des steppes autour du bassin de la mer Noire. Cette arrivée se serait passée à la transition du Chalcolithique vers l'Age du Bronze. Leur descente le long du Danube marquerait le début de l'indo-européanisation de la population autochtone (qui, elle, est supposée par défaut ne pas être indo-européenne). C'est aussi les fondements à la base de l'hypothèse kourgane, nommée ainsi selon la coutume censée être indo-européenne d'accumuler des tumulus (kourganes) sur les sépultures. Selon cette hypothèse les indo-européens partent des steppes de l'Asie centrale et migrent vers l'Europe.

Il existent des éléments matériels à l'appui de cette théorie : le changement notable des récipients en céramique utilisés jusqu'alors - la céramique richement décorée cède la place à des formes simples, tout aussi bien par la forme que pas la stylisation. Disparaissent également les statuettes et les figurines de culte. Des changements se produisent dans le plan des habitations et dans la façon d'ensevelir ses morts (jusqu'alors en position fœtale, plus après). Les déités masculines s'imposent sur la Déesse-Mère. Nombre d'indices archéologiques témoignent de l'arrivée de nouveaux peuples qui bousculent radicalement la vie à certains endroits ou s'intègrent dans le mode de vie de la population locale à d'autres.

Cette première théorie souffre de quelques faiblesses : les tumulus funéraires (pour faire référence aux kourganes) sont répandues dans toute Eurasie et dans la zone de la mer Égée et ses îles. Rien ne prouve leur antériorité à l'est pour dire que ce sont des nomades migrants qui les ont introduits. Sur l'aspect des cultes : même si l'arrivée des nomades imposera des déités masculines chez les Thraces le culte principal a de tous temps été voué à la Déesse-Mère (qui varie par la suite en plusieurs déesses : Bendida (Bendis), Kotito, Zerintia, Braüro, Hipta, Misa et autres).

Selon l'autre théorie, plus adoptée de nos jours, il ne s'agirait pas d'une arrivée de nouvelles populations qui aurait supplanté les autochtones mais d'un processus progressif qui a mélangé sur de très longues périodes nouveaux arrivants et peuples qui habitaient déjà ces terres. Donc, les Thraces seraient un peuple constitué d'une multitude de tribus, fédérés par leur langue et coutumes, entre les Carpates et le bassin de la mer Égée et dont l'entité se serait formée au fur et à mesure des interactions entre autochtones et migrants. N'oublions pas que ce sont les Hellènes qui ont utilisés les premiers le terme Thraces (Traki) pour désigner ces peuples.

Ainsi, de nombreux sites archéologiques prouvent la continuité de vie sur des très longues périodes historiques. De nombreux tumulus néolithiques habités sur la vallée de la Maritza témoignent en ce sens, comme celui de Karanovo (Nova Zagora) еt le tumulus Azmachka (Stara Zagora). La vie à ces endroits a évolué sans jamais s'interrompre, rythmée par les liens d'échange avec le reste de la péninsule des Balkans et la partie occidentale de l'Asie Mineure.

D'autre part des arrivées de nouvelles populations ne sont font pas uniquement du nord / nord-est. De telles migrations sont également remarquées dans le sud de la Bulgarie, entre Stara Planina, les Rhodopes et la mer Égée. La multitude des tribus qui vont en résulter s'inscrira dans une longue période de stabilisation ethnique et culturelle pour former ce qu'on va appeler la Thrace.

Quant au terme Thraces (Traki), il sera définitivement adopté par les Hellènes entre le VI et le V siècle avant notre ère pour désigner leurs voisins du nord en tant qu'entité ethnique avec sa propre langue, mode de vie, religion, structure sociale, politique et administrative différente des leurs. En revanche les Thraces eux-mêmes n'arriveront jamais à l'union, les différentes tribus se feront fréquemment la guerre et plusieurs royaumes existeront durant l'Antiquité.

Au V siècle Hérodote écrit que "...le peuple thrace et le plus nombreux en ce monde après le peuple indien. S'il était gouverné par un seul souverain et s'il était uni, il serait, à mon avis, invincible et plus fort que tout autre peuple. Mais cela est impossible et il est peu probable que ça le soit un jour. Pour cela les Thraces sont faibles. Ils portent beaucoup de noms - chacun en fonction de sa région, mais usent tous des mêmes lois pour toute chose". Thucydide va contester cet énoncé en écrivant que les plus nombreux sont les Scythes. Quoiqu'il en soit, il est que les populations thraces étaient bien plus nombreuses que les Hellènes.

Les peuples thraces

Plus de 130 tribus thraces sont répertoriés à ce jour. En ce qui concerne le territoire de la Bulgarie cette grande famille hétéroclite est dominée par quelques grandes branches :

Moesi : ils ont habité la plaine du Danube, entre les rivière Timok (au-delà de la frontière avec la Serbie) et Yantra (Véliko Tarnovo)
Geti / Getae : Bulgarie du nord-est / Roumanie du sud-est, voisins des Daces
Odryses / Odrisi : les vallées de Maritza, Toundja et Arda, Bulgarie du sud / sud-est et le prolongement en Turquie et Grèce
Asti : la zone de la montagne Strandja (anciennement Astika), Bulgarie du sud-est
Bessi : les Rhodopes
Medi : sur la vallée de la Strouma (Spartacus est originaire des Medi)
Serdi : région de Sofia et Sofia (anciennement Serdika)
Danteleti : région de Kustendil
Crobisi : Véliko Tarnovo / Dryanovo
Triballi : région de Vratza (infligent une défaite à Philippe de Macédoine dans le canyon d'Iskar)

Les plus puissants d'entre-eux furent les Geti et les Odryses. Voir une liste plus complète des tribus thraces.

Globalement les tribus thraces ont connu trois grandes étapes dans leur évolution territoriale. La plus ancienne se situe entre le milieu du second millénaire jusqu'à 1 200 avant notre ère. De ce temps datent les premières indications authentifiées : des inscriptions sur divers monuments à Crête et à Péloponnèse, faits en linéaire A et B. Elles traitent de prénoms thraces comme Pitakos, Bisa, Disa et mentionnent les noms des tribus des Odryses et des Thyni. Avec la consolidation ethnique et culturelle de la communauté hellénistique les Thraces sont repoussés définitivement du sud vers le nord (la péninsule des Balkans) ou bien assimilés pas les Hellènes. Parallèlement en Asie Mineure se consolideront de manière autonome (et non pas suite à des migrations de cette période) d'autres communautés thrace (moesi, phrygi, vithyni, dardan, mygdoni). La première étape correspond donc à une évolution sur le territoire entre la péninsule des Balkans et l'Asie Mineure.

La seconde étape se rapporte au temps de règne du roi macédonien Alexandre III Le Grand (336-323 av.notre ère) et ses successeurs. Des guerriers thraces sont engagés en masse dans l'armée d'Alexandre, usuellement dans l'infanterie ou la cavalerie légère. Lorsque des nouveaux territoires sont conquis en Egypte, en Asie ou en Asie Mineure, les Thraces fondent des villages de colons militaires. Ils obtiennent de la terre et des moyens pour la travailler, établissent leurs coutumes, parlent leur langue et par dessus tout sauvegardent leurs cultes.

La troisième est dernière étape correspond à la dernière phase de la conquête romaine, entre le Ier siècle avant notre ère et le Ier siècle. Des Thraces vaincus sont amenés en esclavage ou déplacés par la force d'abord vers les confins orientaux de l'Empire romain puis (la majorité) vers la partie occidentale (le cas de Spartacus, de la tribu de Medi, sur la vallée de la Strouma). D'autres intègrent les unités militaires auxiliaires (au II siècle ils pourront servir dans les légions) et partent ainsi en diverses directions, en fonction des besoins de l'Empire.

Les dynastes thraces

Les dynasties sont la forme d'organisation politique commune des Thraces. Chaque tribu / peuple a à sa tête un dynaste, qui exerce le rôle de souverain et de prêtre suprême (chez les Thrace la fonction suprême est toujours à double emploi). Le dynaste est entouré d'un conseil constitué d'aristocrates cavaliers. Ces formes d'organisation existent déjà au milieu du second millénaire avant notre ère. En revanche, leur évolution ne suivra pas celle des polis grecs et les processus d'étatisation resteront inaboutis.

Pour mieux analyser et comprendre ce développement politique des Thrace dans la période entre 1 600 et 1 200 avant notre ère, les historiens parlent de la Thrace mycénienne, en faisant en parallèle avec Mycènes. Il ne s'agit pas d'un rapprochement sur le plan archéologique mais sur les similitudes entres les processus socio-économiques et politiques entre les deux territoires (les structures défensives dans les zones montagneuses, les fortifications, les rites funéraires, les échanges économiques et l'influence mycénienne sur les artisanats comme la céramique et la métallurgie).

C'est dans cette Thrace mycénienne qu'apparaît la figure du dynaste (roi). Ils habitent des résidences fortifiées, érigées en lieux montagneux, difficile d'accès. Ils gouvernent le territoire environnant, défendent et agrandissent leur territoire grâce à des activités diplomatiques et guerrières intenses. Pour prototype du dynaste thrace sert la description faite par Homère dans Iliade lorsqu'il parle de Rhésos, un roi thrace qui prit part dans la bataille de Troie. Il arrive sur le champ de bataille sur un char richement décoré tiré par des chevaux plus blancs que la neige et rapides comme le vent. Ses armes sont énormes et recouverts d'or tels qu'ils conviennent à être portés plus par des dieux immortels que par un homme.

Les contours de cette Thrace mycénienne sont dessinés selon Homère et correspondent à trois grandes régions. En partant de l'est vers l'est viennent d'abord tous les Thraces ceinturés par le Hellespont (les Dardanelles). Ils occupent la région du Chersonèse de Thrace et vont à l'ouest jusqu'à la partie inférieure de Hebros (Maritza). Dans Iliade sont mentionnés les noms de leurs souverains - Acamantes et Peiroi (Peiroos).

La seconde région est située entre les parties basses des rivières Mesta et Maritza. Sur cette terre habitent les Cicones (Kikoni), leur ville principale s'appelle Ismar et leur dynaste roi est Maron. D'autres aristocrates guerriers mentionnés sont Euphème et Mentès.

La troisième région, tout à l'ouest, comprend les terres sur la partie basse de la rivière Axios. La région est connue sous le nom de Paeonia (Péoniens), habitée par les Paeoni. Ils sont les plus nombreux parmi les Thraces à participer dans la guerre de Troie. Des commandants thraces mentionnés sont Pyrèchme, à la tête des archers, Astéropée, qui engage un combat avec Achille en lui lançant deux lances simultanément. Homère parle de l'organisation et l'efficacité militaires thraces remarquables.

D'autres rois / dynastes sont mentionnées dans divers poèmes épiques. Ainsi on sait que le roi des Thraces en Phocide habitait à Daulis et se nommait Térée. Dans un mythe il est question des dynastes Likourg et Boutès qui étaient souverains sur l'île de Naxos. A l'embouchure de Maritza, à Enos, gouvernent Sarpedon et son frère Poltis qui tente de convaincre Pâris à renoncer à le belle Hélène. A Salmydessos (auj.Kıyıköy, en Turquie, mer de Marmara) règne Phénée. Un autre roi thrace légendaire est Diomède, souverain des Bistoni, sur la partie inférieure de la vallée de la Mesta. A la tête d'une tribu particulièrement guerrière il jetait à ses juments féroces tout étranger qui traversait ses terres.

Les unions étatiques

A partir du premier millénaire avant notre ère diverses sources rapportent l'existences de territoires fédérés sous un pouvoir commun, assimilés à des unions étatiques. Les mentions sont généralement faites suite à des confrontations des Hellènes avec les Thraces.

Au sud de Stara Planina (le Balkan) se dessine trois régions politiques.

En Thrace du sud-est, dans la zone du Chersonèse de Thrace se situent les Dolonsi (Dolongi). Ils mènent une longue guerre avec leurs voisins (thraces) au nord - les Apsynthes. Les Dolongi ont une organisation politique fonctionnelle à la tête de laquelle sont placés des rois, ils maintiennent des relations diplomatiques avec le monde hellénistique par le biais du temple sacré de Delphes.

A l'ouest d'eux se situe la seconde région, dans la zone qui correspond aux Rhodopes orientales, le bassin des rivières Arda, Toundja et Maritza avec les montagnes Sakar et Strandja. Elle concentre des monuments mégalithiques qui ont été élaborés et utilisés jusqu'au VIe siècle avant notre ère. Dans l'ensemble cette région a été habité par les Odryses (qui vont créer plus tard le plus grand royaume thrace).

La troisième région politique comprend les vallées de Mesta et Strouma, les Rhodopes occidentales et les Rhodopes centrales. Vers Plovdiv et en descendant vers les massifs de Rila et les Rhodopes, à l'ouest des Odryses, habitaient les Bessi. Ils contrôlaient un vaste territoire montagneux. Éloignes de rivages ils n'ont pas attiré l'intérêt des auteurs antiques et vont rester relativement anonymes. Les Bessi ont légué à l'histoire une nécropole impressionnante près du village Douvanlii, Plovdiv, datant d'entre le VIe et le Ve siècle. Cette période correspond également à leur annexion par le puissant royaume des Odryses. Un de leur souverain est Rabokent (Ier siècle avant notre ère), un autre est le prêtre Vologèse (à la tête de la rébellion contre les Romains en l'an 15 av.notre ère).

Entre les vallées de Strouma et Vardar sont concentrées un grand nombre de tribus thraces: Paeoni, Deroni, Mygdoni, Bisaltes, Edoni, Odomanti et autres ayant des organisations politiques propres, présidées par des rois. Certains frappent leur propre monnaie, comme les Deroni, les Bisaltes et les Edoni (sur certaines émissions il est inscrit "Gaetas, roi des Edoni"). Les Edoni sont très actifs politiquement et militairement. Ils combattent des colons hellènes, comme les Athéniens qui tentent de s'établir sur l'embouchure de la Strouma (où ils fonderont plus tard Amphipolis) et participent dans les guerres de Péloponnèse. Thucydide parle d'un de leur dynaste - Pitak, assassiné à la suite d'un complot du palais en raison de son orientation pro-athénienne (les Edoni étaient pro-spartes).

Au nord de Stara Planina se trouvent les grands territoires des Gètes (à l'est) et des Triballes (à l'ouest). Des sources écrites mentionnent pour la première fois un roi Gète vers la fin du IV siècle av. notre ère - Dromihète, qui a vaincu Lysimaque (323 - 281 av.notre ère, successeur d'Alexandre le Grand en Thrace) et le prit en otage. Entre le III et le II siècle av.notre ère nous sont parvenus les noms des rois Gètes Remax, Zoltex, Zalmodegigos. Du premier siècle datent la grande union territoriale des Geto-Dace sous le roi Burebista.

Chez les Triballes l'histoire mentionne le nom du roi Halès qui entreprit une marche militaire vers Abdera en 376/375 avant notre ère. Le souverain triballe Syrme combat l'armée d'Alexandre III le Grand lors de son passage vers le Danube. Peu avant cet épisode, en 339 av.notre ère, les Triballes attaquent Philipe II de Macédoine lors de son passage dans la vallée d'Iskar, le blessent et prennent son butin. De la puissance de leur aristocratie témoignent les riches sépultures dans le tumulus Moguilanska, près de Vratza, ainsi que le trésor de Rogozen, constitué de 165 pièces d'un service.

Au nord du Danube, en Roumanie actuelle, entre le I et le II siècle se constitua l'union étatique des Daces, menés par Décebale.

Les différentes formes d'organisation politique et d'unions étatiques des Thraces vont atteindre leur sommet au milieu du VI siècle avant notre ère avec l'apparition d'un des plus anciens états d'Europe - le royaume des Odryses.

Langue thrace

L'absence d'écriture des Thraces pose beaucoup de difficultés pour en savoir plus sur leur langue. Les diverses inscriptions qui existent sont toute faites en lettres grecques, qu'il s'agit du texte en grec ou bien de texte thrace transcrit avec des lettres grecs (en phonétique). Des inscriptions en thrace avec des lettres grecques ont été trouvés au Sanctuaire des Grands Dieux sur l'île de Samothraki (fragments), sur une bague en or trouvée près du village Ezerovo, Parvomai, sur une dalle en pierre trouvée près du village Kiolmen, Preslav. Pour ne pas faciliter la tâche tous les mots sont enchaînés sans espace entre eux.

En revanche la langue thrace a marqué leurs territoire laissant en héritage un grand nombre de toponymes (montagnes, rivières, lieux-dits), théonymes (déités), ethnonyme (tribus) et des centaines de noms personnels.

Leur langue devait être commune, différenciée par de nombreux dialectes. Strabone écrit que les Moesi, les Gètes et les Daces ne sont pas de moins bons Thraces que les autres. "Les Grecs considéraient les Gètes comme des Thraces; ils habitaient les terres sur les deux rives d'Istros (Danube), tous comme les Moesi qui sont aussi Thraces; Les Gètes sont de la même langue que les Thraces; les Daces sont de la même langue que les Gètes".

Après de la conquête romaine de la péninsule des Balkans et de la soumission des Thraces, au IV siècle les Romains entreprennent la christianisation des territoires thraces. Ils traduisent la Bible dans la langue des Bessi, la grande tribu qui occupe tout le massif Rila-Rhodopes (ville principale Perperikon, près de Kardajli). Cette version de la Bible est appelée Biblia Bessica. Sans qu'elle nous soit parvenue, des témoignages du IV siècle en font mention : Saint Grégoire de Nysse en 394, Saint Jérôme de Stridon en 396, Saint Jean Chrysostome en 399.

Des toponymes thraces sont Hemus (Haemus, Stara Planina (le Balkan)), Osxios (rivière Iskar, Oescus chez les Romains), Istros (Danube), Tonzos (la rivière Toundja), Stronzos (montagne Strandja, signigie au-delà de Tonzos), Beroe (Stara Zagora). Le nom de la rivière Maritza (slave) repose sur l'appellation thrace (Maris). L'ancien nom de Nessebar Messembria est typiquement thrace, le suffixe -bria se rencontre dans beaucoup de noms de lieux thrace et signifie ville. Un préfixe / suffixe courant est deva/dava qui signifie lieu fortifié : Pulpudeva (Plovdiv), Develt (Débelt, Deultum chez les Romains). Un possible chevauchement entre le thrace et le slave concerne le terme puisque chez les Slaves deva signifie jeune fille. Ainsi en bulgare les noms de certains lieux vont se caler sur l'adoption du terme slave (moma, en bulgare) au détriment de la signification d'origine : Momini kouli (litt. Tours de la jeune fille au lieu de Tours fortifiées), Momin prohod (litt. Passage étroit / col de la jeune fille au lieu de Passage gardé), etc.

La majorité des toponymes thraces sont adoptés par les Slaves et par les Bulgares, et non pas leurs appellations grecques. La langue thrace a été parlée jusqu'au VIe siècle. Elle se fond ensuite dans la langue des Slaves et plus tard des Bulgares.

Croyances thraces

La culture thrace est marquée depuis la fin du second millénaire avant notre ère et jusqu'après la création des provinces romaines par l'Orphisme thrace. Il est différent de l'Orphisme grec. Dans ses fondements repose l'idée de la perfection de soi et de l'immortalité.

Conformément à la dualité du système social des Thrace l'Orphisme se réalise à deux niveaux : un secret, accessible à l'aristocratie, aux initiés et un populaire, propre au peuple qui connait l'existence de l'enseignement mais demeure non-consacré (ou bien des adeptes non-consacrés). Deux sont aussi les moyens d'entre en contact avec les dieux, personnifiés par Orphée (l'enthousiasme, le mystère individuel, l'introduction de dieu en soi) et Dionysos (l'extase, la communion, l'accès collectif à dieu).

L'Orphisme thrace repose sur une vision cosmogénique du monde qui repose elle-même sur des phases. Ainsi la Déesse-Mère (Terre), qui est la déité principale chez les Thraces, suit un cycle de quatre phases : elle produit le monde par l'auto-conception, puis elle donne naissance à son fils divin - le Soleil qui (dans la troisième phase) atteint le stade d'homme adulte et qui, finalement, entre en union sacrée avec la Déesse-Mère pour poser ainsi le début du cycle prochain et la naissance d'un nouveau fils. L'Orphisme thrace se base sur un cycle de ces 4, puis encore 3 (7) et encore 3 (10) phases qui organise l'ordre et l'harmonie dans le monde et dans l'univers, l'éternel renouvellement. Par rapport à l'Orphisme grec linéaire il est asymétrique. Orphée est le fils céleste. Il prend aussi d'autres noms, comme Zalmoxis, chez les Gètes. L'Orphisme thrace est bien trop complexe pour qu'il soit décrit en quelques paragraphes. Un certain nombre de ses rituels se retrouvent aujourd'hui dans le folklore bulgare comme les célébrations de Dionysos (Trifon Zarezan, 14 février, fête des vignes), Koukeri (le mythe de Zagrée). L'initiation et ses stades complexes tient une place primordiale.

Les Thraces considèrent que l'esprit et le corps ne font qu'un. Ce qui contraste avec la conception des Grecs chez qui les deux sont séparés, le corps étant une punition pour l'âme qui elle est immortelle. Cette conception thrace se retrouve également dans leur pratique de la médecine. Les Grecs rapportent que les guérisseurs thraces ne conçoivent pas la guérison du corps séparément de la guérison de l'âme. L'immortalité occupe une place centrale chez des Thraces. Ils croient que les âmes des défunts retourneront ou bien qu'ils accèdent à un monde divin supérieur de félicité. Ceci se retrouve dans leur rituels et sépultures. Chez les Gètes il était coutume d'envoyer un messager à Zalmoxis tous les 4 ans. L'homme choisi était jeté sur les piques de lances dressées et il était considéré qu'il accède au stade de messager que s'il meurt sur le champ, autrement un autre été choisi. Lorsqu'un dignitaire thrace décédait, cela donnait lieu à des festivités et une cérémonie funéraire somptueuse. Le corps du défunt était placé dans un tombeau qui s'apparentait à un temple, ensemble avec chevaux, servantes et sa femme favorite. C'était un honneur pour l'épouse d'être choisi pour accompagner son époux, généralement sa mise à mort s'effectuait par enivrement empoisonné lors des rituels festifs. Ce qui paraître sinistre de nos jours s'inscrivait chez les Thraces dans une vision globale de l'Univers où la mort terrestre n'était qu'une étape vers le chemin de l'immortalité.

La Déesse-Mère

Le culte vers Déesse-Mère est le plus répandu pendant le Néolithique, sur un énorme territoire. Sa présence au milieu du second millénaire, lorsque la population sur la péninsule des Balkans sera nommée Thraces par les Grecs, est toujours très forte. Cette déesse est la mère de tout et de tous, la puissance suprême qui rythme la vie. Elle représente la force de qui dépend le cycle universel, la création et la mort, l'ensemble du cycle de renouvellement terrestre. Tout ce qui émane de la nature et qui vit émane d'elle.

Les Thraces la célèbrent lors de toutes leurs cérémonies. La Déesse-Mère est une figure anonyme mais elle prend beaucoup de personnifications. Les plus répandues sont Bendida (Bendis), Cotito, Brauro, Zerynthia, Hipta. Les déesses thraces sont connues des Grecs. Par ailleurs il existe souvent une adaptation des théonymes entre Thrace et Grecs. Par exemple Brauro (déesse vénérée chez les Thraces Pelasgi) existera dans la littérature antique les Grecs comme Brauro Arthémis. Le rajout grec (Artémis) vient s'ajouter une comme une traduction explicative du sens.

La plus forte des personnifications de la Déesse-Mère concerne Bendida (Bendis), présentée le plus souvent portant deux lances, symboles du céleste et du terrestre et des ses deux lumières : lunaire et solaire. Les célébrations de cette déesse étaient les Bendidées. En 430-429 avant notre ère le culte de Bendida accède au rang officiel en Athènes. Chez les Grecs elle prend le plus souvent la forme de Bendis-Arthémis. Autre variation de Bendida est Cybelle. Le culte de Bendida se retrouve jusqu'en Egypte. Il faut noter que dans l'introduction des déités thraces dans le panthéon grec se fait parallèlement aux guerres lors desquelles les Thraces sont alliés des Athéniens, comme pendant la période des guerres de Péloponnèse. Ainsi vient la reconnaissance officielle de Bendida / Bendis, dans le cadre du ralliement aux Athéniens des Edoni chez qui Bendida était vénérée.

Sur les ouvres d'art des Thraces la Déesse-Mère est souvent représentée entourée d'animaux : lions, serpents, aigles et dragons. On peut la voir aussi chevaucher une lionne.

La conquête romaine des terres thraces

Ici nous allons nous arrêter uniquement à la conquête romaine des terres thraces sur la péninsule des Balkans.

La premier contact direct des troupes romaines avec les tribus thraces s'est effectué lors de leur retour après la bataille contre les Séleucides aux Thermopyles en l'an -190 et la défaite définitive de leur roi Antiochos III infligée à la bataille de Magnesia, en Asie Mineure, en l'an -191. Les Thraces attaquent les Romains qui retournent vers l'Italie par les chemins de la Thrace du sud et leur infligent des dégâts considérables.

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