Bien naturellement ce décor majestueux a donné naissance à une multitude de légendes, selon l'imagination des personnes ayant habité ce territoire. La plus populaire est celle qui relate l'histoire du
Moine et de la Sœur
Elle dit que jadis sur les pointes les plus élevées des rochers s'érigeaient un monastère et un couvent. Vivait alors une très belle jeune femme, qui s'appelait Vita, originaire d'un village de montagne aux alentours. Sa beauté était comparée à celle d'une samodiva (être magique féminin qui habitait les forêts, près des sources) - de longs cheveux blonds, des yeux bleus, des lèvres pourpres et un corps gracieux. Lorsqu'elle sortait son troupeau de chèvres, les collines de la montagne résonnaient au son des ses chants mélodieux. Une fois elle rencontra un beau berger - grand, aux beaux yeux noires, et qui jouait à sa flûte en bois (kaval) telle la musique d'un ruisseau vigoureux de montagne. Plus écoutait elle sa musique plus l'amour grandissait dans son cœur. Le berger tomba amoureux lui aussi.
Mais une fois un vieux moine se présenta chez les parents de Vita et leur dit : cette beauté que possède votre fille ne pourra amener que de malheur. Cachez-là loin des mauvais yeux pour ne pas verser plus tard des larmes amères. Seul le couvent peut sauvegarder votre fille. Si vous la laissez libre, elle se perdra elle-même et vous aussi à la même occasion.
Les parents simplets prirent peur. Ils prirent leur fille et l'amenèrent au couvent le plus inaccessible où elle fut consacrée nonne sous le nom de Vitinya, puis mise dans une étroite cellule. Jours et nuis, des semaines et des mois Vita pleurait et implorait son sort. La sœur principale tenta de la consoler, de l'amener à raison, de la menacer avec la punition divine mais rien ne fit, Vita était inconsolable.
Un jour de fête religieuse, lorsque beaucoup de villageois se rendaient au couvent, Vita entendit du fond de sa cellule une triste mélodie de flûte venant de la cour. Elle sortit précipitamment et vit son amoureux qui, à sa vue, se tut instantanément, ne pouvant pas décoller son regard. Mais aussitôt accourut la vieille none pour lui agripper le poignet et la ramener vers sa cellule. Ils se passèrent encore de longs nuits de désespoir avant que Vita n'entende à nouveau le son de la triste mélodie flotter dans l'air. Elle venait du monastère situé sur le pic rocheux d'en face. Ainsi, toutes les nuits suivantes Vita écoutait cette musique si chère à son cœur, jusqu'au lever du soleil. Mais une nuit un orage terrible surgit, le ciel se déchira sous les éclairs, le vent arrachait les arbres de la terre, les tonnerres assourdissantes chassaient le silence. Soudain Vita entendit quelqu'un appeler son nom ! Sous la petite fenêtre de sa cellule se tenait le jeune berger, désormais moine dans le monastère proche. Ils se dirent des mots d'amour, se firent des promesses, comment font tous les amoureux... Dès lors ces rendez-vous nocturnes devinrent régulières, Vita retrouva son calmes et les sœurs conclurent qu'enfin raison fut sur l'entêtement de la jeune femme. Il s'est écoulé ainsi un an.
Mais commencèrent des jours où l'on voyait Vita de moins en moins sortir de sa cellule. La croyant malade, les sœurs évitèrent de la déranger jusqu'au jour où, à la terreur de toutes, un cri d'enfant s'entendit derrière la porte de sa cellule. La sœur principale, devenue folle de rage cria au sacrilège, voulut chasser Vita sur le champ hors du couvent et appela à la punition la plus sévère afin de laver cet affront sur la vie bien-heureuse de la communauté. Les moines du monastère voisin accoururent eux-aussi et après un conseil général il fut décider de chasser la pécheresse et son enfant. Par ces temps cette condamnation était des plus terrible car personne ne portait secours ou quelconque aide aux dépaysés pour faute des couvent et monastère, le signe de la déchéance était à jamais accolé tel un pestiféré. Vita pleura et supplia les sœurs de la laisser ne serait-ce que quelque temps afin que le printemps s'installe au moins et les temps devienne plus clément. Que nenni, elle fut maudite et chassée sur le champ.
Les moines rentrèrent dans leur monastère perché, d'où ils pouvaient voir la figure de Vita s’éloignant du couvent, son enfant serré dans ses bras. Son amoureux la regardait aussi et se demandait comment pouvait-il l'aider. Et soudain la terre s'est mise à trembler, le couvent s'écroula dans un énorme fracas faisant disparaître toutes les sœurs sous les décombres. Vita avec son enfant se pétrifia, tout comme les moines qui se mirent à courir, pris de terreur. Pétrifié fut aussi son amoureux - Luca, resté près de la porte du monastère. Aujourd'hui encore l'on peut voir parmi les rochers les vestiges du couvent écroulé, les figures pétrifiées des moines mais surtout les silhouettes des deux amoureux : le Moine et la Sœur.