Rézovo est le dernier village sur le littoral sud de la mer Noire en Bulgarie, dans la région de Bourgas, situé à la frontière-même entre la Bulgarie et la Turquie. Il se trouve à 11 km de Sinémoretz et à 17 km d'Ahtopol, qui sont respectivement le dernier et l'avant-dernier lieux habités avant Rézovo.
Rézovo intégrait l'un des territoires les plus protégés de l'époque communiste où il était purement et simplement interdit de se rendre. Les infrastructures des divers barrages sur le chemin sont toujours là (avec les vieux panneaux militaires "Interdit de photographier". Même si aujourd'hui il n'y a personne dans les baraquements de la police militaire sur la route, il se peut que des équipes mobiles de la police de frontière vous arrêtent pour vérifier votre identité et se renseigner sur le but de votre voyage. Car Rézovo n'est pas juste proche de la frontière, il est sur la ligne de démarcation avec la Turquie et du même coup - frontière extérieure de l'Union Européenne.
De nombreux touristes viennent tous les jours en été pour visiter le point le plus au sud du littoral bulgare. Et comme en total opposé avec le temps passé, aujourd'hui on peut descendre à la ligne de démarcation même, pour observer de près le côté d'en face. Et comme un témoignage du changement d'époque, l'escalier qui mène en bas (la ligne de démarcation est la rivière Rézovo), se nomme fièrement "Allée Europe".
On se rend au village de Rézovo par un beau petit chemin à travers la forêt de Strandja. Le village lui-même est très petit et ne se remarque pas par rapport aux environs, qui eux, sont d'une grande beauté. Rézovo occupe un plateau rocheux, ce qui permet au visiteur de bénéficier d'un vaste panorama sur le large marin et la Turquie voisine. Le littoral ici et rocheux et abrupte, tout l'inverse du côté turc où il s'aplatit subitement pour laisser la place à une très belle et longue plage de sable doré. La plage du côté turc est inoccupée car elle se trouve en zone de stricte contrôle militaire - une vue à faire perdre le sommeil d'un entrepreneur plagiste bulgare. Surtout qu'à Rézovo la seule vraie plage est d'une taille de poche et se situe sur la ligne de démarcation, donnant la possibilité aux éventuels estivants d'être épiés par les gardes-frontières turques.
En dehors de ces considérations c'est à Rézovo que vous verrez l'une des plus belles côtes sauvages sur tout le littoral bulgare. Elle est tout simplement merveilleuse. La vue panoramique sur la mer Noire depuis le haut plateau, qui sert essentiellement de pâturage pour quelques vaches, vous invite à vous approcher de son bord et là vous découvrez un autre monde. La ligne côtière revêt un relief abrupte, les pans du plateau constitués de roches métamorphiques fragiles descendent tantôt verticalement, tantôt d'une manière légèrement inclinée. Ce paysage permettrait à quelqu'un d'habile et en bonne santé de se faufiler en bas, sur la plage. Oui, il y a une sorte de plage, bien cachée et avec des cailloux en guise de sable. Avec un énorme avantage : vous et rien que vous. Pendant un moment vous pouvez être seul au monde, face à la mer, avec les quelques hauts pilons rocheux isolés devant vous et le vent qui se faufile entre eux. Cette plage caillouteuse, long fruit du travail du temps et de l'érosion côtière, est à faible profondeur sur une 30-ne de mètre. Cela permet de s'allonger dans l'eau (car elle est vite chauffée par le soleil) et vraiment relaxer pendant un bon moment.
Les rochers dans la mer sont souvent occupés par de nombreux cormorans (essentiellement des cormorans noirs, mais aussi des blancs), les eaux étant riches en poisson. Dans les eaux de Rézovo évolue également le dauphin, espèce rare, qu'avec beaucoup de chance vous apercevrez peut-être.
La frontière
Le grand bâtiment de la police de frontière est visible de loin. Les anciennes installations militaires aussi. Un grand grillage-panneau s'élève face à la Turquie, avec comme marqué dessus "Bulgaria" et les signes de l'Union Européenne.
En bas coule la toute petite rivière Rézovska qui constitue la ligne de démarcation. En face, sur la berge élevée se trouve le pilon avec le drapeau turc. Un énorme drapeau turc, d'un rouge flamboyant, contrastant avec le petit drapeau bulgare, usé par le soleil et le vent, qui est arboré de côté bulgare. Drapeau turc régulièrement vérifié par la patrouille de soldats turques, qui scrutent de temps à autre les curieux qui descendent l'allée "Europe" du côté bulgare. Il est interdit de photographier en direction de la Turquie ou sur la ligne de démarcation. Surtout si des soldats vous regardent.
Il y a quelques années quelques pêcheurs turcs avaient été tués par les gardes-frontière bulgares, lorsque leur embarcation se trouvant dans les eaux territoriales bulgares n'a pas répondu aux sommations de s'arrêter. Depuis, comme l'avoue à voix basse un serveur du restaurant proche "Les choses sont tendues des deux côtés". (2011, ndlr)
Il est vivement conseillé de ne pas jouer trop les aventuriers et aller "explorer" près de la frontière, dans les environs de Rézovo, vous risquez d'avoir de gros ennuis.
Histoire de Rézovo
Diverses spéculations tournent autour des origines nom Rézovo, la plus véhiculée concerne le mot Rezos qui signifierait "roi" en langue thrace ou encore que c'était le nom d'un roi thrace qui participa dans la bataille de Troie à côté des habitants de Troie. Le village était connu selon les époques sous les noms Rezbou, Rézvi, Rézvi déré, Rézvé.
Il a été établi qu'une vie s'était organisée ici depuis l'Antiquité. Des traces d'une activité métallurgique organisée de la période entre le IV et le III siècle avant notre ère ont été découvertes ici, par ailleurs les traces les plus anciennes en toute la Bulgarie. Un énorme dépôt rempli de déchets métallurgiques (plus de 100 000 tonnes) a été découvert. A 3-4 km à l'ouest du village se situe un autre ancien site d'extraction de métaux. A sa proximité a été découvert une nécropole thrace. En savoir plus sur les Thraces.
Les fondations d'une petite forteresse (poste d'observation) ont été repérées à 3 km au nord de Rézovo, sur le cap Kastritch. Il est supposé qu'il s'agit de la forteresse byzantine Kastricion.
Durant le Moyen-Âge Rézovo dépendait de la sous-préfecture d'Ahtopol et comptait 41 familles. Sur les cartes connues de cette époque, il est indiqué comme un village qui avait un petit port. Divers voyageurs européens rapporteront des informations de passage sur le village de Rézovo au fil des siècles. Ils décrivent un village pauvre, avec des maisons recouvertes de roseaux en guise de toit. Au début du XIX siècle le village a dû se déplacer de 10 km à l'intérieur, vers Strandja, pour se protéger des invasions des pirates caucasiens. Cependant, la côte n'étant pas très navigable en hiver, les bergers continuaient d'amener leurs troupeaux par ici. La population était occupée dans l'agriculture et dans l'exploitation forestière. Ils exportaient du bois pour Istanbul mais aussi de grandes quantités d'oignon et de pastèques, celles-ci étaient prisées pour leurs qualités gustatives exceptionnelles.
Le Résovo actuel date de l'an 1903. Le village qui se trouvait plus à l'intérieur des terres fut incendié et pillé lors des répressions ottomanes pendant l'insurrection d'Ilinden. Après la fin de la guerre balkanique (1912) de nouvelles familles vinrent d'ailleurs et s'installèrent au village. La dynamique économique de Rézovo s'améliora dans les années 30, les habitants se sont investis dans l'exploitation forestière, les métiers marins, et l'élevage de bétail. Une coopérative s'est créée. En 1926 Rézovo compte 95 maisons pour 378 habitants, dont 70 étaient des réfugiés récemment installés.
Actuellement Rézovo a une 20-e d'habitants permanents. En été sa population augment jusqu'à 4 fois.
