Si Radetzki existe aujourd'hui c'est en mémoire de l'exploit de Hristo Botev, poète et révolutionnaire bulgare, grande figure du panthéon national.
Après l'arrêt et la pendaison de Vassil Levski Hristo Botev se posa comme le porteur le plus fidèle et actif de ses idées révolutionnaires. Son destin tragique fut scellé par le déroulement de l'insurrection d'avril 1876 qui se termina en échec et en catastrophe absolue pour les populations civiles (comme les carnages causés par les bachi-bouzuks à Batak).Cette grande insurrection était planifiée pour le mois de mai 1876 mais trahis, les comités révolutionnaires se virent contraints de donner le signal plus tôt: le 20 avril à Koprivchtitza, alors que les préparatifs pas n'étaient pas encore terminés.
Dans le cadre de ce soulèvement populaire, Hristo Botev fut désigné pour mener une compagnie de volontaires bulgares, réunissant des émigrants bulgares en Roumanie et qui devait opérer dans la région de Vratza
Le 16 mai 1876 Hristo Botev et ses compagnons embarquèrent à Giurgiu, Roumanie, à bord du Radetzki. D'autres les rejoignirent à bord au fil des arrêts sur le trajet. Les volontaires étaient sciemment divisés en petits groupes, habillés comme jardiniers ou ouvriers pour ne pas attirer l'attention des pouvoirs roumains. Le 17 mai ils mirent leurs uniformes de soldats et prirent possession du bateau. A bord, Hristo Botev écrivit une lettre en français au capitaine, l'informant de ses revendications mais écrivit aussi sa lettre d'adieu, destinée à sa femme et leurs enfants. Radetzki accosta à Kozlodouï pour débarquer les insurgés, le capitaine Engleder souhaitant bonne chance à ses ravisseurs dans leur mission sans retour.
3 jours plus tard Hristo Botev tomba près du mont Okoltchitza, dans le Balkan de Vratza. Ses hommes furent tués ou capturés. Pour lire plus sur Hristo Botev et cette expédition.
Le capitaine Dagobert Endleger
Le capitaine de Radetzki, Dagobert Endeger, a lui aussi, laissé à sa façon son nom dans l'histoire de H.Botev et Radetzki. Grâce à lui, des informations importantes nous sont parvenues, jetant plus de lumière sur ces événements.
Il le fit à travers son rapport écrit le 30 mai 1876 au sujet de la prise du bateau par les insurgés. Il dit que Radetzki fut pris une heure après qu'il ait quitté Beket, Roumanie (vers 12h30). Concernant les coffres chargés par les insurgés (qui contenaient les armes cachés), il dit qu'il n'a pu les refuser car ils n'en étaient en rien contraires au règlement de transport des chargements. Il dit avoir été contraint à entendre leurs revendications sous la menace de 6 hommes armés, puis décrit les échanges entre lui et leur commandant (Hristo Botev), leurs uniformes et leurs armes, comment le bateau accosta à Kozlodouï, puis reprit son trajet.
Un second protocole fut rédige le 01 Juin, pour lequel le capitaine Endleger dira plus tard qu'il ne retranscrivait pas de manière exacte les événements et qu'il le signait sous la contrainte (Botev et ses compagnons étaient notamment traités de "brigands" par la presse officielle). Le capitaine avait de la sympathie pour ces jeunes hommes. Il décrit en ces termes ses impressions sur Hristo Botev :
"Botev, quant à lui, me fit une forte impression avec sa droiture, son énergie et son tempérament. Avant qu'on s'approche de la rive bulgare, il m'appela pour me montrer que la caisse du bateau ainsi que son chargement étaient intacts. A leur débarquement j'ai observé une situation solennelle et très émouvante. La voix puissante de Botev se fit entendre et tous ses compagnons sont tombés à genoux, pour embrasser le sol bulgare. A leurs cris d'adieu : "Vive Franz Josef, vive le capitaine !", j'ai répondu "A la bonne heure!" et les saluai quelques fois en brandissant mon béret."
Arrivé à Vidin, le capitaine Endleger refusera catégoriquement à transporter des soldats turques.
En 1925, année de sa mort, le capitaine envoya en Bulgarie des reliques qu'il avait précieusement conservé : le drapeau du Radetzki avec les armoiries de l'Autriche-Hongrie, le sceau du bateau, une copie du rapport qu'il avait rédigé, un recueil de ses mémoires relatifs à ce jour, une copie de la lettre écrite en français que H.Botev lui avait adressée et deux planches du pont de Radetzki, dont une sur laquelle se tint Botev au moment il annonça la prise du bateau.
C'est son frère Adolf qui fut chargé de les amener en Bulgarie. Il les remit au roi Boris III, lors d'une audience exceptionnelle.