Martenitsa
Voici une tradition, celle de la Martenitza, appelée communément Baba Marta. Le 1er Mars, les Bulgares se parent d'un petit pompon rouge et blanc qu'ils porteront durant le mois de mars, ils ne s'en débarrasseront que lorsque les prémisses du printemps s'annonceront.
Une tradition antique
C'est une tradition qui est commune aux populations roumaine, moldave, macédonienne, grecque (nord) et bulgare. Elle trouve cependant sa plus forte expression en Bulgarie. Avec le développement récent des études archéologiques l'on sait désormais qu'il s'agit d'une ancienne pratique rituelle des Thraces (civilisation antique qui habitait la partie centrale de la péninsule des Balkans entre le IV millénaire avant la nouvelle ère et le Ier siècle. Ce rituel consistait à réunir le Fils céleste à la Déesse-Mère, réunification symbolisée par l’emmêlement de feux longs fils : blanc et rouge. Le blanc symbolisait le céleste, le rouge le terrestre. Ainsi la dualité ne devenait qu'un, le cycle de renouvellement était marqué (c'est pour cela que se faisait au tout début du printemps) et le Fils était à nouveau réuni à la Déesse-Mère. Le sort était conjuré lorsque la nature éclos à nouveau - premières floraisons, arrivée des oiseaux migratoires. Alors l'on s'en débarrasse du fil en l'accrochant sur un arbre verdi ou en le mettant sous une pierre.
Pour cette raison ce rituel et sa pratique qui perdure jusqu'à nos jours (même si le folklore local a donné ses versions diverses et variées avec le temps) dans les territoires qui corresponde à l'aire d'habitation des Thraces. Les populations actuelles de ces pays en sont les héritiers. En Roumanie (sud-est en particulier) c'était la famille des Daces (de la grande famille des Gètes), en Grèce du nord ce sont la multitude de tribus thraces de la zone des Rhodopes, idem dans l'actuelle Macédoine (sa partie orientale notamment).
D'autres rituels thraces qui font partie du folklore bulgare sont le Koukeri ou encore la célébration de Saint-George, pour ne citer deux de très importants. En réalité les rituels et les mythes thraces composent l'essentiel du folklore bulgare.
En décembre 2018 l'Unesco a inclus la coutume de Martenitsa dans le patrimoine mondial immatériel de l'humanité.
La légende bulgare
Selon la légende commune en Bulgarie il s'agit d'une tradition qui nous serait parvenue du temps des anciens Bulgares (appelés encore Proto-Bulgares). Ses débuts seraient à chercher dans les années de la fondation de l'état bulgare en 681. En ce temps, les tribus bulgares s'étaient installées dans le delta de Danube, ce qui inquiétait fortement Byzance et les cités grecques sur la côte de la mer Noire comme Odessos (Varna) et Messemvira (Nessebar).
Avant une bataille entre les Bulgares et les Byzantins dont l'issue était incertaine, le khan bulgare dit au siens qu'il ferait signe pour signaler si la bataille était gagnée ou s'il fallait évacuer les campements et fuir. Si l'armée bulgare prenait l'avantage, il enverrait son faucon avec un fil blanc sur la patte, si les Byzantins prenaient le dessus le fil serait rouge. A cette époque les Bulgares utilisaient le faucon dressé, essentiellement pour les parties de chasse.
L'armée du khan alla vers le champ de bataille et une longue attente commença pour le reste de la population. La bataille des armées fut rude mais les Bulgares arrivèrent à plier les rangs byzantins. Alors le khan mis le fil blanc autour la patte du faucon et le lança vers le campement des Bulgares. Les Byzantins sachant que les faucons servaient aussi de messagers tirèrent des flèches en sa direction dont une l'effleura. En se posant au campement, les gens prirent peur car ils virent un fil rouge sur sa patte. Mais à regarder de près, ils constatèrent que c'était le sang du faucon qui l'avait imprégné et qu'en réalité il apportait la nouvelle de la victoire.
Depuis, tous les mois de mars, les Bulgares s'épinglent le revers d'un fil tressé blanc et rouge. Il s'en débarrassent lorsqu'ils voient les prémisses du printemps - une cigogne (ils mettent la martenitsa sous une pierre), des arbres fleuries (ils l'accrochent sur les branches) ou quand le perce-neige apparaît. Il font de même avec les animaux domestiques ou ceux de la ferme.
Cette tradition est respectée au plus haut point, le 1er Mars le Président et tout le Conseil des ministres ne songent pas à se présenter au public sans leur martenitsa accrochée à leur veste.