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La bataille de Doïran

En aucune guerre les Britanniques n'ont donné tant de victimes comme ce fut le cas à Doïran
Lloyd George, premier ministre

La bataille de Doïran illustre l'une des plus grandes et brillantes opérations militaires menées par l'armée bulgare lors de la Première guerre mondiale.

Doïran est le nom d'un lac qui se situe actuellement à la frontière de la Grèce (nord-est) et de la Macédoine (sud-est). La frontière entre ces deux pays passe par le milieu du lac. Les environs du lac de Doïran sont devenus le théâtre macabre d'une des plus grandes batailles sur ce front en Europe, opposant les forces de l'Entente (France, Angleterre, Grèce) et l'allié de l'Allemagne - la Bulgarie. 3 ans durant l'armée bulgare garda de façon infaillible les positions de Doïran - 1916, 1917 et 1918.

En 1915 le commandement allemand demanda à l'armée bulgare d'arrêter son avancée sur le front macédonien et de tenir le front contre les forces de l'Entente qui se rapprochaient. Les Bulgares s'arrêtèrent alors à la frontière entre la Grèce et la Serbie et mirent en place de fortes positions défensives.

La campagne de 1916

Au début d'août 1916 trois divisions françaises coloniales et une division anglaise comptant 45 000 personnes et 400 canons entreprirent une attaque sur les positions bulgares de Doïran. Les positions étaient défendues par la Seconde division Thrace d'infanterie. Le 9 août, au petit matin, un feu nourri d'artillerie s'abbatut sur le 27e régiment de Tchépino et le 9e régiment de Plovdiv. Les attaques terrestres qui s'ensuivirent le 10, 15, 16 et 18 août furent repoussées, partiellement avec l'aide de la 9e division de Pléven. Les forces de l'Entente se retirrèrent laissant 3 200 morts contre 1 356 pour les Bulgares (régiment de Plovdiv - 250 personnes, régiment de Tchépino - 1 106 personnes).

La campagne de 1917

Le général Vladimir Vazov

En 1917 la Seconde division Thrace est relevée par la 9e division d'infanterie de Pléven, sous le commandement du colonel Vladimir Vazov (frère du grand écrivain bulgare Ivan Vazov).

Le 9 et le 10 février les forces de l'Entente attaquèrent les positions du 33e régiment de Svichtov et le 34e régiment de Troyan, sur la hauteur Boris. Le régiment de Troyan repoussa les attaquants au terme d'une contre-attaque. Une seconde tentative fut effectuée le 21 février et fut à nouveau repoussée, cette fois par l'artillerie de la division.

Une seconde grande attaque fut tentée entre le 3 et le 22 mai 1917, portée par 3 divisions anglaises (22,26 et 30) équipées de 160 canons, 11 lanceurs de mines et 440 mitraillettes lourdes.

Entre 12 au 16 mai l'armée anglaise "prépara" le terrain de l'attaque moyennement un feu nourri d'artillerie. Plus de 100 000 obus furent tirés en 4 jours. L'attaque terrestre s'effectua la nuit du 16 mai mais n'arriva pas à percer au-delà des avant-postes et les Anglais furent repoussés.

Un autre bombardement d'artillerie sur quelques jours fut effectué par les Anglais et l'attaque terrestre fut renouvelée le 21 mai. Plusieurs assauts échouèrent, l'armée anglaise fut décimée par un contre-feu d'artillerie bulgare, suivi des contre-attaques de l'infanterie.

Les Bulgares perdirent 2 000 hommes dont 990 suite à des blessures. Les pertes adverses étaient de plus de 12 000 tués, blessés ou faits prisonniers. Le colonel Vazov est promu général-major.

La campagne de 1918

Advint l'étape la plus lourde de la bataille de Doïran.

En 1918 la 9e division de Pléven renforça sensiblement ses positions défensives, lesquelles s'étendaient désormais sur une profondeur de 15km. Chaque position disposait de protections de fils barbelés et des trous profonds par les devants. Une défense antiaérienne était également organisée.

Les armées de l'Angletterre et de la Grèce concentrèrent de lourds moyens contre la division bulgare - 4 divisions et 1 compagnie d'infanterie, 1 compagnie d'artillerie lourde et de nombreux détachements d'artillerie et d'ingénierie. Au total c'était 60 000 hommes, 231 canons (dont 117 lourds), 24 lanceurs de mines, 300 mitraillettes lourdes. Cette opération s'inscrivait dans un plan d'une contre-avancée totale sur le front macédonien. Une attaque était parallèlement planifiée à Dobro Polé, portée sur la 3e division bulgare d'infanterie dite du Balkan.

L'attaque sur Doïran dura 4 jours et nuits, entre le 16 et le 19 septembre 1918 et fut précédée par un tir d'artillerie massif sur les positions bulgares d'une durée de 2 jours, totalisant plus de 160 000 obus. Des attaques parallèles au gaz ont été menées (14 attaques avec 10 000 obus).

Les combats se menèrent sans interruption et avec beaucoup d'acharnement, sur plusieurs axes d'attaques. La division de Pléven se lança avec toutes ses réserves contre l'adversaire qui était de plusieurs fois supérieur en nombre et le repoussa. Les pertes anglaises et grecques étaient de 11 673 hommes, 547 furent faits prisonniers. Du côté bulgare : 518 tués, 998 blessés et 1 210 disparus sans laisser de trace.

L'attaque contre la 3e division bulgare à Dobro Polé ayant réussi, le général Vazov obtint alors l'ordre d'abandonner les positions de Doïran et de se retirer vers la Bulgarie.

L'après Doïran

Même si l'armée bulgare fut contrainte de se retirer des positions de Doïran, sa défense militaire reste dans les annales de l'histoire militaire bulgare comme l'une des opérations les plus brillantes.

La tenue de Doïran fut utilisée plus tard dans l'argumentation diplomatique d'Andreï Lyaptchev à Thessalonique pour que la Bulgarie ne soit pas occupée par les forces de l'Entente (après la défaite de l'Allemagne et la fin de la Première guerre mondiale).

Le général Vladimir Vazov, commandant de la 9e division de Pléven à Doïran, écrit dans ses mémoires : "Des tas de milliers de cadavres ont obstrués les collines... Ce n'étaient pas de mercenaires sénégalais (* allusion aux divisions françaises coloniales) mais des Anglais pur sang, venus de Londres, Birmingham et Cambridge"

Le premier ministre anglais Lloyd George écrit : "En aucune guerre les Anglais n'ont donné tant de victimes comme ce fut le cas à Doïran"

En 1936 à Londres est organisée une célébration pour la fin de la Première guerre. La délégation bulgare est présidée par le général Vladimir Vazov. Lorsqu'il descend du train à la gare Victoria, sur le quai attend un détachement de l'armée anglaise et le commandant en place donne l'ordre suivant : "Baissez les drapeaux ! Ici passe le vainqueur de Doiran !"

Doïran aujourd'hui

Le lac et ses environs sont aujourd'hui un lieu paisible et très pittoresque. Les collines voisines sont fleuries, la montagne d'en face se dresse majestueuse et les chants d'oiseaux sont les seuls perturbateurs de ce paysage. Si l'on pouvait décrire Doïran en mot, ça serait - relaxant ! Tellement le lieu et calme et enchanteur.

Sauf si vous y trouvez lors d'un orage d'été et que les foudres déchirent le ciel. Les coups de tonnerre se retrouvent alors multipliés par 3 grâce à l'écho de la montagne voisine. à cet instant, le Doïran de 1918 émergera sous vous yeux tel un fantôme : les nuages lourds se transforment en fumée d'artillerie, les tonnerres - en tirs d'obus. Heureux que nous sommes, ce fantôme sera chassé par un rayon de soleil, reléguant la guerre à l'enfer du passé.

Un mémorial est érigé sur une colline, une colonne sur laquelle sont inscrits les noms des soldats britanniques. Vous verrez le cimetière des Anglais plus bas, fleuri tel un jardin. Un peu à l'écart, plus modeste, se trouve le cimetière grec. Quant à celui des Bulgares, il n'existe pas.

Si vous voyagez vers la Bulgarie depuis la Grèce, vous pouvez visiter Doïran en prenant au nord-ouest après Thessalonique. La route mène vers la frontière bulgare, toute proche depuis Doïran.